Alors qu’ils espéraient se positionner sur l’échiquier continental à un peu plus de deux mois des JO de Tokyo, les quatre sélectionnés olympiques tricolores de canoë slalom sont rentrés fanny des championnats d’Europe en Italie.
De son périple à Ivrea pour la reprise des compétitions internationales, la délégation tricolore a bien failli ne rien garder du délicieux sentiment de dolce vita. Pas plus que du scénario d’un braquage à l’italienne. Des quatre membres de l’équipe olympique qui représentera la France à Tokyo cet été, tous ont buté au seuil de la finale : pour une porte manquée (synonyme de 50 secondes de pénalités) s’agissant de Martin Thomas et Marjorie Delassus, pour un chrono ne rivalisant pas avec le top 10 de leur catégorie pour Marie-Zelia Lafont et Boris Neveu. Alors faut-il s’inquiéter de l’absence du carré d’As hexagonal sur les podiums ce week-end ? Pas encore, principalement pour deux raisons.
Les Bleus dans le tempo
Primo, si les résultats ont triste mine, les prestations des français n’étaient pas si funestes qu’il n’y parait. En réalité, Marie-Zelia Lafont a plutôt bien négocié son retour à la compétition. Après avoir fait l’impasse sur la PyCup et les piges, l’Orthézienne n’avait plus enfilé de dossard depuis octobre 2020. Et comme il est coutume dans la discipline, l’accès en finale s’est joué dans un mouchoir de poche. « Je n’étais pas très bien fixée sur une option », remarquait Lafont. « J’aurais dû la bétonner davantage : cela m’a coûté de l’énergie et provoqué ma touche. J’ai peut-être manqué un peu d’engagement en demi-finale, mais j’ai quand même réussi à avoir de bonnes sensations. »
Il en va de même pour Marjorie Delassus. Même si la Paloise s’était déjà retrouvée en délicatesse lors des qualifications, l’obligeant à arracher son billet pour les demis en Q2, son chrono aux portes de la finale lui aurait permis d’y accéder sans une porte manquée. « En regardant la vidéo, il y a des choses positives : la vitesse est là. Il me reste encore du travail, je vais essayer de revenir meilleure. »
Quant à Boris Neveu, en recherche de régularité depuis quelques semaines, le ressenti est « mitigé. Il y a du travail, j’en suis conscient : ne pas rentrer en finale est un échec. Mais je fais partie des bateaux rapides, c'est le plus important, donc je reste optimiste pour la suite. »
Des enjeux différents
Secundo, les enjeux n’étaient pas les mêmes pour tous les participants. Contrairement à la France, plusieurs nations n’avaient pas encore leurs quotas pour les JO et pour ceux déjà sélectionnés, les résultats ne sont pas non plus au rendez-vous. « Dans ce contexte, les Allemands et Italiens ont réalisé des courses extrêmement relevées », note Christophe Prigent, head coach français. « D’autres cherchaient davantage de repères, de placements. Je ne suis donc pas inquiet d’autant que la compétition faisait suite aux piges où les athlètes s’étaient beaucoup investis. »
« On aurait tous aimé concrétiser davantage », remarque Marjorie Delassus. « Mais ce n’était pas non plus l’objectif de la saison, donc on va rester focus jusqu’aux Jeux. »
Avec un peu plus d’expérience, de repères et une condition qui devrait se rapprocher de leur pic de forme d’ici l’été, l’équipe olympique devrait être davantage armée pour rivaliser avec les autres leaders internationaux à l’horizon de la prochaine Coupe du Monde.
Du reste, la France a produit quelques belles performances avec notamment la victoire de Denis Gargaud qui renoue avec le succès depuis le Brésil (lire par ailleurs). Mais également celle du jeune Nicolas Gestin qui avait déjà brillé lors des piges et qui ravit une 5e place. Deux féminines ont aussi passé le cut des finales : Camille Prigent (6e) et Lucie Prioux (7e).
Denis Gargaud au sommet de l'Europe
Après une saison 2020 marquée par sa non-sélection pour les Jeux de 2021, Denis Gargaud revient en force avec une médaille d’or européenne quinze jours après son sacre sur la scène nationale.
Sa performance lui a permis de hisser le pavillon tricolore au plus haut dans l’écho d’une Marseillaise, le seule du week-end en Italie. Si Denis Gargaud a, sans conteste, l’un des palmarès les plus garnis de tous ses coéquipiers et notamment au niveau continental avec deux médailles d’or par équipe, une breloque manquait à sa collection : celle de champion d’Europe. « Je suis très heureux de cette victoire qui vient boucler la boucle d’un palmarès dont je suis très heureux après mon titre mondial en 2011 et la médaille d’or aux JO de Rio », se réjouissait Gargaud à sa descente du podium.
Constant tout au long du week-end (16e des qualifications puis 5e de la demi-finale), le champion olympique en titre a cependant bien failli voir sa victoire éclipsée par une décision arbitrale. Après avoir coupé la ligne de son ultime manche, et s’être retourné vers le tableau d’affichage, le sociétaire du Marseille Mazargues CK faisait non de la main : 50 secondes de pénalités lui avaient été attribués au milieu du parcours. « C’était une réaction à chaud. Pendant la course, je n’avais pas de doute et je n’étais donc pas d’accord avec la décision : c’était la première fois que je me retrouvais dans cette situation. » Mais après seulement quelques minutes, le classement était totalement remanié et la performance du français entérinée : son chrono était le meilleur de la journée dans un parcours qui ne présentait (finalement) pas la moindre scorie. « Les images montraient clairement que mon passage était clean, c’est la raison pour laquelle ils ont déjugé. »
Après son titre national il y a quinze jours, continental ce week-end, Gargaud qui n’avait plus gagné depuis le Brésil a retrouvé son meilleur niveau. « Je suis tourné vers l’avenir pour faire en sorte de performer au maximum de mes capacités sur mes dernières années de carrière. » La suite logique serait une nouvelle couronne planétaire (après 2011). Indices en juin avec les deux Coupes du Monde qui attend le collectif senior et réponse en septembre sur le bassin de Bratislava pour les Mondiaux.